REVUE DE PRESSE
[DNA] : Communication sans dessous
Vendredi 24 avril 2009
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Sarah Bouhaddi, la gardienne, Gaëtane Thiney et Corinne Franco, trois des joueuses de l’équipe de France qui ont accepté de se prêter au jeu de cette campagne de communication autour de l’équipe de France féminine.
[Hémisphère Droit/Pauce FFF]
Jouer en équipe de France féminine conférerait-il une autre responsabilité que pour les garçons ? Oui, assurément, si l’on en croit le sens de la campagne de communication lancée par la FFF le mois dernier. La fédération a demandée à une agence de travailler à développer la couverture médiatique de l’équipe de France féminine.
L’idée retenue est de faire poser nue plusieurs joueuses des Bleues avec, pour objectif officiel « de faire évoluer l’image que le public a du football féminin ». Les photos, très belles au demeurant, sont flanquées d’un slogan qui laisse songeur : « Faut-il en arriver là pour que vous veniez nous voir jouer ? » semblent interroger les quatre joueuses qui ont accepté de relever le défi. Les photos ont été dévoilées pour la première fois dans un hebdomadaire gratuit de sport « SportWeek », diffusé à 500 000 exemplaires. Et la FFF compte aller plus loin encore à travers des contacts avec des grands titres de la presse féminine comme « Marie Claire » ou « Le Figaro Madame ». La campagne a fait la une, au début du mois de « Foot Mag », le nouveau mensuel de la Fédération. Bruno Bini, le sélectionneur, interrogé sur le sujet, se montrait volontiers critique sur le traitement médiatique auquel était soumis son équipe. « Quand on se qualifie pour l’Euro en tête de notre groupe, on a droit à trois lignes dans les journaux » explique Bini qui voit cette campagne de promotion comme un « coup de gueule ». « Ce que je trouve désastreux, c’est d’être obligé d’en arriver là. Nous sommes en 2009 et des filles doivent se mettre à nue pour attirer l’attention ». Ce sentiment est globalement partagé par de nombreux acteurs du foot féminin.
« C’est certainement une bonne manière de faire parler du footbal féminin, d’attirer un certain public masculin dans les stades », souligne Sandrine Ringler, ancienne internationale et cadre technique féminine à la Ligue d’Alsace. « Quatre filles ont eu le courage d’y participer mais c’est grave d’en arriver là. Aujourd’hui, c’est la qualité de la pratique qui devrait mobiliser les spectateurs et les jeunes pratiquantes ». Si le football féminin continue sa progression, on constate une certaine stagnation depuis trois ans.
Une certaine stagnation
« Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public : oui d'accord. Mais qu'elles se donnent en spectacle, à certains jours de fêtes, où sera convié le public, qu'elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n'est pas entourée de murs épais, voilà qui est intolérable ! » La phrase est signée Henri Desgranges, célèbre journaliste français à l’origine de la création du Tour de France. Il faut dire que l’immédiat après première guerre mondiale est le moment faste du football féminin en Angleterre et en France. Des rencontres internationales réunissent plus de 50 000 personnes, les clubs se multiplient et les femmes s’organisent (création de la fédération des sociétés féminines sportives de France en 1918). Mais les opposants sont nombreux, à telle enseigne que la FA (football association anglaise) interdit le foot féminin en 1921 avant qu’il ne meurt à petit feu, en France, au début des années trente, pour réapparaître, officiellement, au début des années 70 (c’est en Alsace qu’est relancé le football féminin en 1967, il est reconnu par la FFF trois ans plus tard). Comme si ce football au féminin épousait régulièrement les contours des grands mouvements d’émancipation des femmes. Une forme de bataille qui semble devoir se poursuivre aujourd’hui encore.
Le nombre de licenciées, de 35 000 en 2000, est passé à 60 000 en 2007, avec une progression régulière, mais n’a progressé que de mille unités depuis. On est très loin des grands pays du foot féminin comme les Etats-Unis (7 millions de pratiquantes), l’Allemagne (1 million), mais aussi l’Angleterre (150 000 licenciées) qui, pourtant, partait d’aussi loin que la France. « Tout ce qui contribue au développement du football féminin est bon à prendre mais je pense qu’il y a peut-être d’autres choses à faire que ce type de campagne. Je pense que l’on insiste pas assez sur la qualité technique des joueuses d’aujourd’hui», poursuit Sandrine Ringler.
« On voit régulièrement des clips sur la promotion de l’arbitrage, pourquoi pas autour de la pratique féminine ? Récemment, la demi-finale de la Coupe d’Europe entre Lyon et Duisbourg était retransmise sur ARD et pourquoi pas sur une chaîne nationale en France ? Et puis il y a l’obligation des clubs pros à disposer d’une section féminine, on en parle depuis dix ans mais on oblige sans de réelles contraintes, pourtant on voit ce que des clubs comme Lyon ou Montpellier ont pu apporter au développement du football féminin. Je pense qu’il faudrait afficher une volonté plus claire ».
-- VITE DIT --
Animations
Le match amical France – Suisse de Colmar, samedi prochain, sera l’occasion d’une grande journée de promotion du football féminin en Alsace. Outre la rencontre, on y retrouvera un tournoi de 16 ans à sept avec pas moins de dix-huit équipes présentes, mais aussi un tournoi « graines de championnes » pour les 12-13 ans, avec 13 équipes en lice. Par ailleurs, les filles qui ont participé à l’opération « Graines de championnes » à Oberhergheim auront la chance de pouvoir accompagner les joueuses sur le terrain. Enfin, l’équipe d’Alsace des 14ans, tout juste de retour de la coupe nationale à Vichy, constituera le bataillon des ramasseuses de balle pour le match. Par ailleurs, la volonté est d’attirer le maximum de spectateurs avec des tarifs très attractifs : 7 euros en tribune, 3 euros en place debout. La location a lieu à la Ligue d’Alsace, au Leclerc et au Super U de Colmar ainsi qu’auprès des SR Colmar.
Arbitrage
C’est tout le monde du football féminin qui sera à l’honneur samedi au stadium de Colmar. En effet, outre les jeunes joueuses des différents clubs alsaciens, l’arbitre du centre du match amical entre la France et la Suisse sera également une Alsacienne. Séverine Zinck, originaire du Nord de l’Alsace, sera en effet l’arbitre du centre et retrouvera une équipe de France qu’elle a déjà arbitré en match amical. (Elle sera également 4e arbitre du match amical de ce soir à Dijon). Séverine Zinck officie régulièrement en CFA2 chez les garçons et en D1 féminine chez les filles. Arbitre de la fédération depuis 2004, Séverine Zinck a fêté ses trente ans le mois dernier.
Dynamique
Cette double confrontation entre la France et la Suisse rentre dans la phase de préparation de l’équipe de France en vue de l’Euro 2009 qui aura lieu en Finlande du 23 août au 10 septembre prochain. L’équipe de France sera, au sein du groupe B, opposée à la Norvège, à l’Islande, avec qui elle était déjà en phase qualificative, et à l’Allemagne, épouvantail du groupe, double championne du Monde, et victorieuse des quatre dernières éditions de l’Euro. Les deux premiers de chaque groupe et les deux meilleurs 3e se hisseront en quart de finale. Il n’empêche que l’équipe de France est plutôt, sous la houlette de Bruno Bini, dans une dynamique positive avec une seule défaite en compétition officielle depuis deux ans et ce revers, lors du match aller des qualifications à l’Euro en Islande. Au cours de ses 23derniers matchs, l’équipe de France ne s’est inclinée qu’à quatre reprises.
Le 16e de l’histoire
Ce match amical France –Suisse féminin de Colmar sera le 16e de l’histoire, le 15e se jouant ce soir à Dijon. Les Françaises mènent largement au score dans ces confrontations directes avec sept victoires, trois nuls et seulement quatre défaites. Cependant, la dernière opposition entre les deux équipes, le 14 août 2002 à Clairefontaine, avait tourné à l’avantage des Suissesses (2-1), alors qu’il faut remonter à 1999 et à un match amical à Weil-am-Rhein, à côté de St-Louis, pour trouver trace du dernier succès tricolore. Cette rencontre de samedi à Colmar sera aussi la seconde en Alsace. En effet, un match amical féminin France-Suisse s’était déroulé en 1972 à Gundershoffen. Funeste souvenir d’ailleurs puisque les Bleues avaient subi un large revers en s’inclinant 5-2 face aux Helvètes.
Recordwoman
L’équipe de France féminine actuelle arrive à maturité avec des joueuses qui affiche une moyenne d’âge aux alentours de 25 ans. La leader de cette formation est Sandrine Soubeyrand qui affiche le record de sélections avec les Bleues avec pas moins de 134 sélections avant cette double-rencontre France-Suisse. A 36 ans, elle évolue au milieu de terrain de Juvisy et officie depuis exactement douze ans en équipe de France. A ses côtés, on retrouve également une autre joueuses très expérimentée, Candie Herbert, 32 ans, attaquante d’Hénin-Beaumont, mais aussi des jeunes comme Amandine Henry ou Eugénie Le Sommer, vingt ans à peine, ou encore Melissa Plaza, la jeune joueuse de La Roche en D2 qui pourrait honorer sa première sélection cette semaine.
Stéphane Heili // Alsace Foot n°302 mercredi 22 avril 2009 // 2148 lectures