REVUE DE PRESSE - ARBITRAGE
[L'Alsace] : Le joli coup de tête de Séverine Zinck
Mercredi 13 octobre 2010
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Vendredi dernier à Rodez, Séverine Zinck arbitrait pour la première fois une rencontre de National.
[Photopqr/Le Midi Libre/Yves Estivals]
L’Alsacienne Séverine Zinck a effectué ses débuts en championnat National vendredi soir à Rodez. Elle est la première femme arbitre à siffler à un tel niveau.
C’est une première à ce niveau. Vendredi dernier, Séverine Zinck, 31 ans, a été la première femme à arbitrer une rencontre de National, le troisième échelon du football français. À Rodez, l’Alsacienne, professeur des écoles dans la région marseillaise, a été lancée dans le grand bain, face à un public bouillant, pas content de la défaite des siens face à Créteil, d’autant plus qu’un Ruthénien a été expulsé durant la rencontre. « Cela s’est bien passé, souligne la jeune femme originaire de Mothern, avec un léger accent du sud. Bien sûr, l’environnement a été un peu différent de ce que j’ai connu avant. Il y avait 2000 personnes, alors qu’en CFA, ils ne sont parfois que 50 à se déplacer. »
Pourtant, trois mois plus tôt, le moral n’était pas forcément au beau fixe chez l’Alsacienne. Après une seule année en CFA, classée 8 e des arbitres de ce niveau, elle s’est retrouvée aux portes du National, seuls les sept premiers étant promus. « Je me suis retrouvée à la mauvaise place et je ne l’ai pas bien vécu ».
Quatre entraînements hebdomadaires
Le 22 juillet dernier, elle apprend qu’une erreur administrative a été commise et qu’elle accède donc au niveau supérieur. « Cela a été une surprise et une grande joie », mais aussi le début d’une préparation forcenée. Durant deux mois, Séverine Zinck parfait sa condition physique, met l’accent sur la vitesse, avec un zeste de musculation, afin de réussir les tests, qui sont les mêmes que pour les hommes. « Cela demande des efforts plus importants, car nous n’avons pas la même morphologie ». Mais, pugnace, l’Alsacienne passe ce cap et s’entraîne désormais quatre soirs par semaine, avec des collègues de la Ligue de Méditerranée.
Une volonté de fer, voilà le principal trait de caractère de la jeune femme. « Tout est parti d’un coup de tête, sourit-elle. J’aimais le foot et j’allais voir jouer l’équipe de Mothern, mon village, tous les dimanches. Je n’avais jamais vu une femme arbitrer, mais mon père m’a dit que cela existait. Je me suis renseignée et, quelques jours plus tard, je suivais mon premier cours. À 18 ans ».
La théorie ne lui cause guère de problème. Elle apprend par cœur et réussit les examens. Les débuts sur le terrain sont faciles. « C’était à Soultz, un match de 15 ans. Il s’est terminé sur le score de 16-0 et j’ai eu juste à siffler pour remettre la balle au centre… »
« Je me donne les moyens de réussir »
Mais elle se rend vite compte qu’il n’est guère évident d’appliquer sur la pelouse la théorie, surtout quand on n’a jamais joué au football. « L’expérience se forge sur le terrain, c’est là qu’on apprend. Quand je fais quelque chose, je le fais à fond. Je me donne les moyens de réussir ».
Et cela fonctionne. Après trois ans chez les jeunes, elle passe de la D3 départementale bas-rhinoise à la Division d’honneur en seulement cinq ans, toujours soutenue par ses proches et les dirigeants de l’arbitrage alsacien. En 2007, elle accède en CFA2, en 2009 en CFA, avant de grimper encore l’été dernier. Peut-elle encore viser plus haut ? « Je suis montée très vite, l’objectif est donc de me maintenir à ce niveau, de m’y implanter. Mais quand j’ai débuté, jamais je n’aurais imaginé arbitrer en CFA 2, encore moins au-delà. Je me suis toujours trompée. Alors pourquoi pas ? Il faut avoir de l’ambition dans la vie ». Et du courage, car « plus le niveau s’élève, plus il y a d’argent et d’enjeu, moins il y a de retenue chez les joueurs. Et le public ne fait aucun cadeau. J’ai déjà entendu des choses désagréables, mais c’est pareil pour les hommes ».
Après le match Niort - Beauvais, le 22 octobre, Séverine Zinck pourrait bien fouler une pelouse de Ligue 1, comme 4 e arbitre. « Ça fait rêver un peu, mais j’attends cette désignation avec une certaine impatience. Tout en sachant qu’il faudra alors se tenir prête en cas de pépin physique de l’arbitre ». Mais vu son côté battant, elle devrait aussi franchir cet obstacle-là.
Marc Wilb // L'Alsace du mercredi 13 octobre 2010 // 2104 lectures